De Tulcea (Roumanie) à Istanbul (Turquie)
Le vent venant de la Mer Noire ne s'est pas
atténué : sortis de la ville, la protection que les habitations
offraient contre celui-ci disparaît et le combat reprend. Nous abdiquons
en faveur d'un micro-bus direction Constanta à 130 km de là. En bus, le
paysage défile à toute vitesse et les gens aperçus disparaissent en une
fraction de seconde. Le chauffeur doit avoir un rendez-vous capital à
Constanta vue l'allure à laquelle il roule. Les 5 ou 6 icônes orthodoxes qui
pendent à son rétro–viseur ne parviennent pas à nous rassurer. Un
« m'en-fous-la-mort » comme on dit au Sénégal. Arrivés indemnes
à Constanta, nous apercevons pour la première fois la Mer Noire. La
première fois aussi que l'on voit des « HLM » en bord de mer
avec entre les deux des terrains vagues à chiens errants. Replaçons le
mot « HLM » dans son contexte. Si on les qualifie ainsi, c'est
plus par leur aspect extérieur que par le niveau de vie des
occupants : en fait souvent des classes moyennes. Ici, pas de
banlieues – ghettos, toute la ville semble une banlieue.
Après Constanta, direction la Bulgarie à 70
km, le vent est toujours là ; il faut se faire une raison, la seule
issue pour y échapper est de se réfugier dans les vallées de la Stara
Planina (chaîne des Balkans). La route du bord de mer est donc exclue. En
Bulgarie, nous privilégions les petites routes de campagne. La carte en
cyrillique permet de s'orienter en individuel, celle en alphabet latin
nous sert à avoir la bonne prononciation quand on demande un
renseignement. A chaque intersection, il faut jeter un œil sur le plan
car les noms en bulgare sont difficiles à mémoriser visuellement. Nous
traversons seulement deux villes importantes : Dobrich et Sumen.
Certainement pas parmi les plus belles mais elles ont le mérite d'être
plus authentiques que les « réserves architecturales » des
villes touristiques. Le changement de comportement des gens à notre égard
est radical. Les Bulgares nous apparaissent beaucoup plus réservés, moins
directs, moins communicatifs que les Roumains. C'est finalement assez
reposant d'être moins sollicités. 80 km après le passage du col de Kotel
(700 m), nous arrivons dans une zone forestière que nous ne quitterons
plus jusqu'à la frontière turque : immenses forêts de chênes
(pendant 150 km environ) entrecoupées de quelques prairies. Cochons
sauvages, villages perdus parfois espacés de 20 km… Un jour, nous aurons
même du mal à trouver à manger (à part un saucisson périmé depuis mars)
et nous nous contenterons de pain et chocolat. Nous passons la frontière
turque à Malko. Nous y rencontrons un cycliste suisse qui vient du Cap de
Bonne Espérance. Il voyage depuis 15 mois et est content d'avoir le vent
de la Mer Noire dans le dos.
A notre grande surprise, la Turquie, c'est
aussi vert que la France au printemps (la différence est qu'au bout de
deux mois, tout est probablement « grillé »). Les minarets au
milieu des champs de blé : une des images que l'on n'avait pas en
tête avant ce voyage. Dans le premier village turque, premier thé
(tchai) : au milieu de la salle, un poêle à bois et un stère de
bûches entreposé à côté. Tous les vieux ont détourné leur regard de la
télé et nous fixent sans rien dire, dos au poste de télévision. La
première ville turque est Kiklaleri. En pénétrant dans le centre, nous
prenons conscience de notre arrivée en Orient. La place centrale est un
« souk » comparable à ceux du Maghreb. La nuit venue tous les
gens arpentes, les petites échoppes sont innombrables.
A la sortie de la ville, nous faisons la
connaissance de Martin, un Allemand parti de Berlin à vélo depuis un mois
et qui a le projet de rejoindre la Chine. Nous roulerons ensemble pendant
trois jours (jusqu'à Istanbul). Le fait d'être trois attire encore plus
de monde. Nombreux sont les Turcs de cette région qui ont migré
temporairement en Allemagne. Non sans fierté, devant leurs compatriotes,
ils parlent avec Martin de ce passage de leur vie (puis traduisent en
turc ce que Martin leur dit).
Une autre fois, à Vize, ce sont des
enseignants qui feront venir un collègue prof d'anglais pour jouer le
rôle d'interprète. Bien sûr, à chacune de ces rencontres, on nous offre
plusieurs « tournées » de thé. L'arrivée à Istanbul n'est pas
de tout repos. A 20H00, au milieu d'un trafic très dense, nous sommes sur
une 4 voies à 15 km du centre de la métropole. Le soleil commence à
baisser. Martin choisit de chercher un terrain de camping alors que nous
souhaitons dormir dans un hôtel, comme prévu pour notre arrivée. Quelques
temps après cette séparation, la nuit tombe et il devient inconscient de
rouler à vélo dans Istanbul. Nous faisons part de notre désarroi à un
jeune à bicyclette : il nous conduit alors à la station de métro la
plus proche. En 15 minutes, nous avons rejoint le quartier Aksarai en
plein centre – ville et avec un choix multiple d'hôtels bon marché. Comme
nous a dit notre guide à VTT : « il y a du 2 étoiles, du 1
étoile et même du zéro étoile si tu veux ! ».
Nous sommes le 18 mai. Après 2 mois et demi
et 4500 km de pédalage, nous sommes au bord du Bosphore, à la porte de
l'Asie.
Vélos en Europe
• 2 crevaisons pour un vélo
• 0 pour l'autre
• 3 pneus remplacés
• 4 paires de patins de frein
remplacées
Médaille d'or pour les 2 chaînes qui avec
11000 km sont peut être en passe de battre un record de durée de vie
(malgré un taux d'usure de 75% au départ de notre traversée de l'Europe).
Cafés
Ce n'est peut être pas une information
révolutionnaire mais le meilleur expresso est italien. En Italie, même le
café – machine offert par les douaniers était très bon. Quand la demande
est exigeante, la qualité suit.
En Slovénie, l'expresso est encore présent
mais sa qualité se détériore. Il devient de plus en plus long.
En Hongrie, c'est le règne du café-filtre.
C'est dans ce pays que l'on trouvera la tasse de café la moins chère du
périple : 30 forins soit 12 centimes d'euro, servi dans un verre
certes.
En Roumanie (Transylvanie), l'expresso n'est
pas réapparu. Une cuillère en métal pour tout le bar ou des cuillères
individuelles en plastique lavées et réutilisées : c'est au choix.
En Moldavie (région de Roumanie), le café
turque où il y a autant à boire qu'à manger fait son apparition sous
l'appellation « natural café ». Les Hongrois et les Carpates
ont pu freiner son avancée et l'empêcher de se répandre en Transylvanie.
Etonnamment, en même temps que le « natural » café, se renforce
la présence du Nescafé. Il faut souvent préciser si vous désirez un café
« archaïque » ou un café « moderne ».
En Bulgarie, le café turque alterne avec
l'expresso qui réapparaît. Les Bulgares semblent apprécier ce dernier et
sont assez bien équipés en machines. Parfois, on regrette qu'ils aient
fait l'investissement.
En Turquie, le café turque est très bon,
très nourrissant mais on en a trop bu auparavant. On finira le voyage au
tchai, le thé noir en fait plus répandu dans cette partie de la Turquie
que le café.
Pour voir les photos c'est ici
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