De
Puerto Montt (Chili) à Comodoro
Rivadavia ( Argentine )
Chiloe:
L’île mythique…
Chaque été : lieu
de pèlerinage pour des chiliens
à la recherche des
« racines » du pays. Pour nous, c’est plutôt du genre vacances de février en Normandie ou en
Bretagne. A y regarder de plus près, il est vrai que Chiloé ne manque pas
de particularismes : églises jésuites ou d’inspiration jésuite,
maisons sur pilotis, des gens moins typés européens que dans le reste du
Sud chilien, des fruits de mer, des algues assez nauséabondes vendues
parait-il aux japonais et surtout du saumon. Pas la peine de demander
« el menu del dia », c’est du « salmon » :
lundi, mardi, ou n’importe quel autre jour. Il est vrai que les
nombreuses quilles rouges flottant dans les baies de l’île nous avaient
paru suspectes…mais oui, l’excellent saumon de Chiloé provient
d’élevages. Nous en avons eu la confirmation en passant devant des
multinationales du poisson (Pacific Star, Salmon Antarctica…). Le saumon
est devenu ces dernières années l’industrie phare de Chiloé. Tout ça pour
dire qu’on est assez loin des pauvres pêcheurs affrontant le courant de Humboldt
avec de fragiles chaloupes : Thalassa nous aurait menti !? Il y
a encore beaucoup de gens qui vivent difficilement de la pêche à Chiloé mais il n’ y a pas que ça…
« T’inquiètes pas je te promets qu’on mangera du saumon sauvage en
Patagonie » Et que retrouvons nous dans les fjords de Aysen ?
Des petites quilles rouges…On a compris : si tu veux du saumon
sauvage, vas le pêcher toi-même.
La route australe:
Prenez une carte du Chili,
trouvez Puerto Montt, regardez un peu plus bas : une seule route poursuit
vers le Sud…C’est la carretera longitudinale australe, CLA en abrégé.
Cette piste s’ est frayée un passage entre les fjords, les canaux, les
lacs, les «cerros » de la cordillère, les volcans endormis, les
glaciers en activité, …Puis, brusquement, la partie continentale du Chili
devient un champ de glace infranchissable (El campo de hielo sur). Nous
sommes au km 1250. La conquête du pays n’ira pas plus loin.
Initié, puis défendu par
Pinochet, ce projet controversé a, une fois achevé, rempli son contrat :
la région n a pas été envahie par le gourmand voisin argentin, il ne faut
plus que 4 heures pour aller à l` hôpital lorsqu’ on habite Puerto
Puyahuapi. Si Santiago est toujours aussi loin, la route australe a crée
une sorte de fil d’ Ariane entre les « pueblitos » d’Aysen.
Nous avons emprunté la partie
Nord de la carretera australe jusqu'à Coyhaique, « capitale »
de la
Patagonie chilienne, 40000
habitants, fondée en 1929. Pour nous, la route australe a été une somme
de faits avérés et de surprises.
Tout d’abord, les faits
avérés :
La forêt d’Aysen est une
jungle verte, impénétrable, indomptée, immaculée… Bref, ici, l’homme n’a
pas encore eu le dessus, la partie n’est pas encore gagnée…
Le climat est pluvieux :
plus qu’en Norvège, plus qu’en Islande ou qu’en Amazonie. Pour notre
part, le bilan est simple : il a plu tous les jours. On a
l’impression que tous les nuages nés du Pacifique se sont éternellement
donnés rendez-vous ici.
Chaque semaine, sauf en
hiver, des cyclistes du monde entier la parcourent, pour se
confronter à un mythe, né en 1988 et nourri des carnets de route des
uns et des autres, diffusés depuis quelques années sur internet.
Ensuite, les surprises :
Contrairement à ce qu’on a lu dans lesdits carnets de
route, les clôtures sont encore assez présentes le long de la carretera.
Jungle impénétrable ou clôture : le problème du camping sauvage
reste entier. Avec une moyenne de 10 véhicules par jour, on peut
cependant se permettre de planter la tente au bord de la piste.
Les gens ne sont ni plus, ni
moins hospitaliers qu’ailleurs. Comme ailleurs, ils cherchent à gagner
leur vie. Ils proposent des chambres
à louer. Le fameux dicton
sud - chilien « descends de
ton cheval, desselle ta monture » s’est modernisé en « descends
de ton vélo, viens payer une chambre ».
Les glaciers descendent
vraiment très bas : certains jusqu’ à 400 m ou 500 m d’altitude
alors que l’on est à 44º de
latitude Sud.
En parcourant la route
australe, on traverse une région encore en cours de colonisation
aujourd’hui. Celle-ci s’effectue principalement dans les nombreuses
vallées. L’occupation de la terre se fait en trois étapes. Un :
incendies de forêts volontaires pendant la vingtaine de jours ensoleillés
annuelle. Deux : érection de clôture délimitant la « propiedad
privada ». Trois : introduction de vaches et taureaux
« défricheurs ». Visuellement, cela se traduit par des
troupeaux de bovins pâturant au milieu d’arbres calcinés, le tout entouré
de fils de fer barbelés.
La route australe étant
quasiment le seul axe de communication d’Aysen, il faut s’attendre à revoir les personnes une ou plusieurs
fois. Illustration : le releveur de compteurs électriques rencontré
sur le ferry entre Puerto Montt et Chaiten revu au km 25, au km 50 et au
km 120 ; le chauffeur de camion rencontré sur le ferry, revu au km
75 ; le propriétaire d’une chambre d’hôte du km 0 revu au km
450 ; le propriétaire d’une chambre d’hôte du km 300 revu au km 450…
Patagonie argentine :
En parcourant 100 km de la côte Pacifique à la
frontière argentine, la pluviométrie annuelle est divisée par dix. C’est
sous un grand ciel bleu que le douanier Argentin tamponne nos passeports.
Me gusto Argentina ! Pampa patagonienne désertique, vent puissant
dans le dos, route bien plus sauvage que la carretera australe ( 3
vehicules par jour), 30 km de mauvaise
piste en une heure sans pédaler, chevaux sauvages galopant à travers la pampa, flamands roses,
guanacos…
Le tableau serait parfait si
la route filait droite vers l’océan Atlantique. Malheureusement, parfois,
elle tourne…Alors que le vent, lui, jamais (presque jamais)…
Entre Sarmiento et Comodoro (150 km), nous pédalons au milieu des puits de pétrole. C’est là , en
plein désert battu par les vents, que 6000 personnes travaillent à l’approvisionnement de l’Argentine en
or noir.
Enfin, après 30 km de descente au milieu des « mesetas », sur fond de
rocaille rouge, se détache soudainement du bleu : el Oceano
Atlantico.
Massu et Gonzales :
Enfin ! Ils ont presque
oublié Massu et Gonzales : ça fait quand même deux mois que les JO
sont terminés. Mais bon, il y a l’excuse de la Coupe Davis qui a suivi de près. Au fil des jours, les visages des deux
champions sont apparus à peu près
partout : journaux, publicités, posters, télé, palais de la Moneda, bus, magasins, stations service…Les yeux de plus en plus
cernés…Massu et Gonzales étaient partout et dans toutes les bouches.
« - Te gusta
tennis ?
MASSUEGONZALES !! »
Chiliens : fermés ou
non ?
Comme prévu, il est difficile
de répondre à cette question. La
seule chose que l’on peut dire, c’est qu’au niveau des gens, nous avons
eu le pire et le meilleur.
Un exemple du pire :
Trois jours au sein d’une
famille dont chaque membre a fait le pari de ne pas nous adresser la
parole et d’être le plus désagréable
possible. Je demande le père : éteint la lumière sans mot dire dès
qu’on l’allume. Je demande la mère : nous donne du bois de chauffage
au compte-goutte. Du coup notre chambre est un frigo alors que leur pièce
commune est surchauffée. Je demande le fils : il a à peu près trente
ans et habite chez ses parents. Pour leur demander quelque chose, il doit
traverser notre chambre. Vingt fois par jour.
Un exemple du meilleur :
Deux jours chez Sarah et
Danielo à Coyhaique. Nous
partageons un grand repas et goûtons aux recettes des deux cuisinières du
moment : les spaghettis au yoghourt pour Dabla, la cazuela de poulet pour Sarah. Alors qu’il pleut
(étonnant non ?), Sarah et Danielo nous laissent leur maison pendant
qu’ils travaillent. On a surnommé cette « casa de
familia », la « maison
fait comme chez toi ».
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